1790 le pardon du roi

Commune: 

Texte: 

Un morceau d'anthologie :

Lettre du roi du 24 mai 1790, accordant son pardon aux habitants de Montmélian  "au sujet des excès scandaleux auxquels ils se sont livrés"

Le roi de Sardaigne, de Chypre et de Jérusalem
Très chers, bien-aimés et féaux, nous n'avons pu écouter sans émotion le rapport qui nous a été fait des témoignages de soumission et de repentir que les députés de notre ville de Montmeillant
 (sic) sont venus porter au pied du trône, pour implorer de notre clémence la rémission générale de la peine que les habitants de ladite ville auraient encourue par les exces scandaleux auxquels ils se sont laissés entraîner le 16 et le 17 de ce mois.
Nous nous sommes rappelé à cette occasion les preuves de fidélité et de bravoure que leurs ancêtres nous en données de tout temps, et notamment dans la défense de la place durant les guerres passées ;
et l'époque de ce jour qui nous est si cher, celui de la naissance de mon très aimé fils, le prince de Piémont, n'ayant pu qu'ajouter encore aux sentiments de notre bonté paternelle, nous avons déterminé de signaler ce jour par un acte de clémence qui faisant cesser toute poursuite judicielle, contre les habitants de Montmeillant, rendez le calme à leurs familles, et nous rassure à jamais de leur fidélité et de leur obéissance.
Nous chargeons en conséquence le commandant chevalier du tour d'annoncer au conseil de ladite ville le pardon et l'oubli général que nous avons accordé aux habitants d'icelle, qui ont eu part aux excès sus énoncés;
Et en vous faisant part de nos présentes déterminations, afin que vous vous y conformiez, nous prions Dieu il vous ait quand sa Sainte garde.
À la …nevie, le 24 mai 1790
Signé Victor Amé, et contresigné Granevy, et scellé du grand sceau en placcard.

 

Lettre de S.E. M. le commandeur Granery ministre d'État au département des affaires internes, du 26 mai 1790, à M. le Chevalier et 2d président Bavoz, par laquelle il lui envoie le Billet du roi ci-devant, et lui fait part des secours que S.M. fait passer en Savoie, tant en denrées qu'en argent.

Lundi 24 du courant jour de la naissance de S.M.R. Monseigneur le prince de Piémont, le roi fit grâce aux habitants de la ville de Montmeillant, qui s'étaient livrés le 16 et le 17 du même mois aux excès scandaleux qui vous sont connus.
S.M. ayant ensuite signé le billet ci-inclus, pour que le  Sénat ait à surseoir toute procédure à cet égard, Elle a chargé par un autre billet M. le commandant Chevalier du tour d'anoncer cette grâce à la ville de Montmeillant.
Ma plume ne saurait vous exprimer, Monsieur, le sentiment du roi, et vous répéter tous ce que S.M. m'a dit à cette occasion.
" Je ne veux pas différer, a-t-elle eu la bonté de me dire, à leur refaire grâce, c'est le jour de la naissance de mon fils, héritier de la couronne, j'embrasse volontiers cette occasion.

Leurs ancêtres étaient de braves gens, ils ont défendu la place avec bravoure, ils ne peuvent avoir dégénéré ; leur erreur n'a été que momentanée ; depuis huit siècles, les Savoisiens doivent avoir appris à connaître leur  maître.
La troupe qui y doit être envoyée n'est que pour contenir les brigands et les malfaiteurs ; mes braves sujets sauront se défendre eux-mêmes, et en imposer aux séditieux, s'il y en a encore d'ailleurs : je risquerais de confondre les innocents avec les criminels, et cela coûte trop à mon cœur."
Je n'ai pu qu'applaudir des sentiments qui m'annonçaient toute la sensibilité dont le cœur de sa S.M. était ému. Si
S.M. n'a pas moins été sensible au détail que je lui ai fait de l'état de détresse dans lequel gémissent les habitants de plusieurs provinces de la Savoie.
S.M. m'a ordonné tout de suite d'y faire transporter du blé et du riz ; ces ordres ont été exécutés, le blé et le riz est en route ; il sera suivi d'autre quantité en proportion des besoins ; et je pense que dans peu, ces blés paraîtront sur les marchés  de la Savoie, ce qui produira nécessairement une baisse dans les prix de cette denrée de première nécessité.
Le roi a fait plus. Le sort des pauvres l'a touché au-delà de toute expression. S.M. vient de donner ses ordres pour que ses finances fournissent une somme proportionnée à leurs besoins. Elle a porté ses vues sur la répartition de cette somme, et a nommé pour cela un congrès auquel vous êtes aussi nommé pour assister, ainsi que vous l'apprendrez par M. L'évêque
(sic).
Je me fais un devoir de vous annoncer, Monsieur, ces traits de Bonté et de Bienfaisance du Roi, et je ne doute pas que vous aurez soin d'en informer le Sénat.
J'aurai seulement l'honneur de vous ajouter ici que S.M. est persuadée que tous les membres de ce corps de magistrature, et vous en particulier, Monsieur, vous occuperez de concert à seconder ses vues paternelles qui toutes sont dirigées au bonheur que ses sujets, et à leur inspirer la juste confiance qu'ils doivent avoir dans le gouvernement sage et éclairé qui veut le bien, et emploie tous les moyens propres pour y parvenir.
J'ai l'honneur d'être avec un très profond respect, Monsieur, votre très humble…
Signé Granery


En résumé :

Certains habitants de Monmélian se sont révoltés, dans un temps de disette (mais cette explication n'est pas avancée)
Le Pouvoir  royal veut bien  pardonner à la ville, par pure bonté.
Mais on envoie tout de même la troupe, et les séditieux n'ont qu'à bien se tenir - qu'ils se méfient des notables en place!
"Par pure compassion", le roi qui a compris le danger, prend cependant des mesures pour limiter les effets de la misère, qui est réelle.
2 ans plus tard, les premières troupes révolutionnaires venues de France entraient sans aucune difficulté dans cette partie de la Savoie : étonnant, non ?
 

Bibliographie, Source(s): 

AD073 cote 2J 27, vue 52