La Commanderie en 1794

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Texte: 

La « mise en location » de la Commanderie de Sainte-Hélène de Lac en 1794
1794. C'est la Révolution, en France dès 1789, en Savoie depuis 1792. Les lieux de culte sont fermés, les aristocrates ont été nombreux à quitter la Savoie "deçà les Monts".
À Ste-Hélène du Lac, les Templiers avaient élevé une Commanderie, reprise après leur éviction par d'autres moines-soldats et thérapeutes, les Chevaliers de St-Jean de Jérusalem (Chevaliers de Malte). On voit ici qu'une famille noble, les Roberty, avait pris leur suite. Mais les voilà émigrés ! Leurs biens sont séquestrés, et gérés par le Conseil de la municipalité "en bon père de famille": ils sont "acensés".

                 Acensement passé par le Conseil général de Sainte-Hélène de Lac
                 au citoyen Hugues Bincaz
L’an second de la république française une et indivisible et le 27 nivose1  à 11 heures du matin, à Sainte-Hélène de Lac dans la maison appartenant à la ci-devant commanderie du même lieu, par devant moi notaire soussigné et en présence des témoins à la fin nommés, le conseil général de la ville de ladite commune étant en permanence dans ladite maison, et où étaient les citoyens Bernard Mollot, Maire ; Joseph fils de feu François Bertet ; Clément Simond, Étienne Bertier, Joseph fils de feu Pierre Bertet et Sébastien Raffin, officiers municipaux ; Louis Tissot, agent national ; François Pognien, Hyacinthe Desaëre, Claude et Jean-Marie Voguet, Claude Duffoz, Étienne Michaud, Claude Chabord et Jacques [Sounnet], notables ;

lesquels en conséquence de l’adjudication faite en faveur du citoyen Hugues Bincaz de la mise de l’acensement des biens ci-devant appartenant à François Auguste Roberty et dépendant de la ferme située au présent hameau, ensemble de ceux qu’il cultivait et récoltait en économie, ainsi que par verbal du 3 novembre dernier (vieux style), ont acensé et acensent de la meilleure manière qu’il se peut faire de droit audit citoyen Hugues fils de feu Jean-Baptiste Bincaz natif de cette commune et habitant celle de la Chavanne, ici présent et acceptant, savoir :

les biens ci-dessus spécifiés ainsi que les bâtiments qui en dépendent, avec les bâtiments de maître et le jardin qui y est attaché ; et c’est pour le terme d’une année commencée audit jour, 3 novembre, ce qui comprendra la récolte des semailles de la Saint-Michel dernière, les travaux des vignes et les semailles de Pâques de la courante année, comme encore la récolte de toute espèce de fruits de la même année, et les semailles du blé noir prochaines si ; et sous la cense de onze veissels et quatre cartes de froment ; 19 veissels et quatre cartes de seigle ; sept veissels et quatre cartes d’orge ; et de trois veissels et quatre cartes de blé maïs ; de deux tonneaux et un baril de vin ; de 10 pots d’huile et de 20 douzaines de …… soit ……

Payable ladite cense par moitié en deux termes, dont le premier sera à la Saint-André prochaine, et l’autre à la fin de Nivôse suivant ; et encore, sous les conditions qu’il plantera six arbres fruitiers dans les endroits convenables desdits biens, et cela dans ce printemps ; qu’Il n’en coupera aucun, ni vert, ni sec ; qu’il cultivera lesdits biens en bon père de famille, représentera à la fin les semences employées aux semailles dernières, suivant la quantité qui sera vérifiée ; comme aussi deux bœufs, deux vaches et une génisse servant à la culture desdits ; un chariot, une charrue, une personne, une [poutre], un barrotier2 avec son [chainier], et une caisse de tombereau avec son [train] seulement, sans aucune ferrure ; le tout quoi a été estimé par deux experts respectivement convenus, à la somme de 495 livres ; enfin, 60 quintaux de foin, autant de paille, et quatre chariots de blache3 qui se trouvent dans lesdits bâtiments.

Se rapportant au surplus les parties aux autres clauses et conditions spécifiées audit verbal d’enchères, dont les parties promettent d’observer le contenu, ainsi que ce qui est convenu par le présent, le tout aux peines respectives de tous dommages, intérêts et dépens, sous l’obligation et constitution, savoir : ledit Bincaz de ses biens propres, et ledit conseil, de ceux de ladite commune.
Et pour plus de sûreté des engagements contractés par ledit Bincaz, à sa prière a comparu le citoyen Claude fils de feu Antoine [Sonnet], natif et aussi habitants de la dite commune de la Chavanne ; lequel après avoir renoncé à tous bénéfices de division, d’ordre et de discussion, s’est rendu caution et principal observateur desdits engagements, obligeant à cet effet avec la clause de constitut tous ses biens présents et futurs, et se soumettant à tous dommages, intérêts et dépens, et aux mêmes peines, obligation et constitution de biens, ledit Bincaz a promis et promet de relever ledit citoyen [Sonnet] de tous ce qu’il pourra souffrir pour raison de ce cautionnement.
Fait et prononcé audit lieu, en présence de François Revolet, natif et habitant de la commune de Saint-Pierre de Soucy, et de Claude [Renchet], natif de la Chavanne et habitant de cette commune, témoins requis.
Tous ont signé sur la minute, sauf les témoins Joseph fils de Pierre Bertet et Chabord, qui ne sachant écrire, y ont fait leur marque
(…). Jean-Baptiste Crozet notaire

 

1- 16 janvier 1794
2- une barotière (barautière, barrotière) était un sentier utilisé pour faire circuler des brouettes (barouettes, barotes…).
3- blache: herbe des zones humides à feuilles coupantes. Fauchée encore verte et séchée à l’ombre, cette plante était appréciée dans l'alimentation du bétail, la litière - et pour pailler les chaises.

Bibliographie, Source(s): 

AD073cote 2C 1014 F° 235 (Vue 242)